Les tribulations d'un Marrakchi à Marrakech

La fureur de lire

Bsg_2 Avec beaucoup de retard, je réponds à l’invitation d’Amine qui me conviait à me soumettre au « questionnaire de Procuste ».

Je m’y emploie avec plaisir. Pour une fois, c’est un questionnaire intelligent qui circule sur les blogs.

Tout d’abord, il m’a permis de découvrir qui était ce fameux Procuste (un nom qui me disait vaguement quelque chose, mais je n’étais pas loin de penser que c’était une variété d’insectes). Pour en savoir plus sur Procuste, les explications d’Amine sont excellentes, et si vous souhaitez apprendre qu’ « En informatique, on donne parfois le nom de Procruste à une affectation de variable formatée », vous pouvez aller sur Wikipedia.

Ensuite, ce questionnaire éveille de vieux et délicieux souvenirs de lecture, et replonge dans la nostalgie de ces périodes de lecture fébrile vécues pendant l’adolescence. C’est souvent pendant l’adolescence qu’on lit le plus, habités par une véritable « Fureur de Lire » comme dirait Jack Lang (qui n’a pas dit que des conneries).

Comme toujours avec ce type de questionnaire, il faut faire des choix déchirants: comment réduire sa liste de livres préférés à 4 incontournables ? Mais il faut jouer le jeu…

Les 4 livres de mon enfance

-    Oui oui et la gomme magique. (Probablement le premier livre que j’ai lu)
-    De la terre à Lune de Jules Vernes (Le premier d’une longue série de romans de Jules Vernes que j’ai dévorés goulûment)
-    La Gloire mon père de Marcel Pagnol.
-    Le Bonheur des dames d’Emile Zola (Le premier roman « classique » que j’ai lu et premier choc littéraire)

Les 4 auteurs que je lirai et relirai

-    Borges
-    Céline
-    Proust
-    Romain Gary

Les 4 auteurs que je ne lirai probablement plus jamais

-    Virginie Despentes
-    Tahar Benjelloun (ses romans ne se renouvellent plus)
-    Christian Jacq (c’était un moment d’égarement)
-    Pascale Roze (c’en fut un autre)

Les 4 premiers livres de ma liste à lire ou à relire (liste réduite "d'indispensables")

-    Mort à Crédit de Céline
-    L’Idiot de Dosteivsky
-    Belle du Seigneur de Cohen
-    Les Mémoires de Saint-Simon

Les 4 livres que je suis en train de lire

-    La cinquième femme de Henning Menkell (un polar)
-    Cosa Nostra de John Dickie (passionnante rétrospective historique de la mafia sicilienne)
-    Morocco that was de Walter Harris (un document exceptionnel)
-    Le consul honoraire de Graham Greene (Merci Blaise pour le tuyau)

Les 4 livres que j’emporterais sur une île déserte

-    La Recherche du temps perdu de Proust
-    Les Essais de Montaigne (ça fait « frime » ça.. mais c’est un tel bonheur à lire)
-    La Passion de Al-Hallâj de Massignon (sur une île déserte, j’aurai enfin le temps de lire ce monument)
-    Petit Manuel de survie de Francis Galton (pour apprendre à préparer de l’émincé de ragondin sur l’île déserte)

Les premiers mots d’un de mes livres préférés

« L’homme sans qualités » de Robert Musil

"On signalait une dépression au-dessus de l'Atlantique; elle se déplaçait d'ouest en est en direction d'un anticyclone situé au-dessus de la Russie, et ne manifestait encore aucune tendance à l'éviter par le nord. Les isothermes et les isothères remplissaient leurs obligations. Le rapport de la température de l'air et de la température annuelle moyenne, celle du mois le plus froid et du mois le plus chaud, et ses variations mensuelles apériodiques, était normal. Le lever, le coucher du soleil et de la lune, les phases de la lune, de Vénus et de l'anneau de Saturne, ainsi que d'autres phénomènes importants, étaient conformes aux prédictions qu'en avaient faites les annuaires astronomiques. La tension de vapeur dans l'air avait atteint son maximum, et l'humidité relative était faible. Autrement dit, si l'on ne craint pas de recourir à une formule démodée, mais parfaitement judicieuse : c'était une belle journée d'août 1913."

Les derniers mots d’un de mes livres préférés

« Je suis un chat » de Natsume Soseki

« J’abandonne la lutte. Advienne que pourra. Je ne veux plus essayer de m’accrocher. Je laisse retomber où la nature les appelle mes pattes de devant et de derrière, ma tête et ma queue. J’ai fini de résister.
Petit à petit, le bien-être m’envahit. Je ne distingue plus la souffrance du bonheur. Je ne sais plus si je suis dans l’eau ou dans le salon. Où que je sois, quoi que je fasse, cela ne m’importe plus. Je me sens bien. Non, je n’ai même plus de sensation de bien-être. Je fauche le soleil et la lune du ciel, je pulvérise les cieux et la terre, j’entre dans le mystérieux royaume de la paix. Je suis entrain de mourir. La paix s’obtient dans la mort. Il faut mourir pour entrer dans la Paix. Au nom du bouddha Amitabha…. Au nom du bouddha Amitabha… Grâces soient rendues…. Grâces soient rendues.

Je passe le relai à Blaise et à Meriem. Au boulot!

19/06/2007 dans Livres | Lien permanent | Commentaires (4) | TrackBack (0)

Zaynab, reine de Marrakech

ZaynabJ’ai enfin eu le temps de lire le roman de Zakya Daoud , Zaynab Reine de Marrakech, qui raconte la vie de Zaynab, épouse du Sultan Youssef Ben Tachfine, fondateur de la Dynastie des Almoravides et de Marrakech.

Je reste sur un sentiment mitigé. Ce roman a des qualités littéraires indéniables. Le récit est fluide et la prose légère. Zakya Daoud a réussi à bâtir une histoire solide et plausible à partir d’informations historiques maigres et rares.

Mais deux choses m’ont agacé et gâché mon plaisir. La moins grave est la présence de certains passages dont le style s’apparente plus au genre de l’essai qu’à celui du roman. Ces passages cassent la magie du livre : on quitte l’ambiance envoûtante du Maroc du XIe siècle (dans laquelle Mme Daoud réussit brillamment à nous plonger dès les premières pages), pour se retrouver assis sur les bancs inconfortables et académiques d’un amphi d’université.

L’autre reproche que je fais à ce livre est le portrait psychologique que Zakya Daoud fait de Zaynab. Elle lui attribue des pensées, des attitudes qui me semblent anachroniques. Zakya Daoaud met dans sa bouche et dans sa tête des paroles et des pensées qui ne sont pas de son époque. Ce n’est même pas la posture féministe qui me dérange, c’est l’impression que nous avons parfois que Zaynab lisait toutes les semaines Cosmopolitan, Femme Actuelle et Psychologie.

Je me souviens de cette expression : « il faut que je me reconstruise ». A ce point du roman, j’ai interrompu ma lecture pour rire quelques minutes. Emmanuel Béart parle ainsi, pas une femme née dans la vallée de l’Ourika en 1039.

Malgré ces petits travers, ce roman est une lecture agréable et passionnante. Je vous le recommande.

21/12/2005 dans Livres | Lien permanent | Commentaires (5) | TrackBack (0)

Deux livres pour aimer les maths

GuedjSimonsingh

Un jour ensoleillé de mai 1998, à midi pétantes, j’ai rendu ma copie de l’épreuve de mathématiques du concours d’admissibilité à l’EDHEC (école de commerce de Lille). Je me souviens que c’était un problème de probabilités et que la solution finale était une Loi de Poisson (Ne me demandez pas ce que c’est exactement, je ne m’en souviens plus).

 Depuis cette date, les mathématiques les plus compliquées que j’ai faites devaient consister en une « règle de trois »ou dans la résolution d’une modeste équation à deux inconnues.

 Sans avoir été particulièrement brillant en maths (je me suis pris de mémorables gamelles à certains tests), j’ai toujours aimé cette matière, l’élégance de certains raisonnements, la beauté éthérée des chiffres, le plaisir de trouver une solution après des heures d’errance et de tâtonnements, etc….

 J’éprouve donc une nostalgie pour l’époque où je faisais des maths un peu plus compliquées que les calculs d’épiciers qui sont le lot de la vie professionnelle. La sensation d’avoir les oreilles en feu après un test de maths de quatre heures me manque.

 Pour me faire plaisir, je me suis offert deux livres de vulgarisation mathématique cet été : Le Théorème du Perroquet de Denis Guedj et Le Dernier Théorème de Fermat de Simon Singh. Ce sont deux livres très simples, accessibles à tout le monde (même aux plus hermétiques aux chiffres) ; et qui permettent de briser beaucoup d’idées reçues : non, les mathématiques ne sont pas une science aride pour autistes à lunettes, mais un univers passionnant et coloré, riche en surprises et rebondissements.

 Si vous n’aimez pas les maths, ces deux livres vous offriront une occasion unique d’apprendre à les apprécier, et vous feront regretter d’avoir passé vos cours de maths à écrire des mots doux à la jolie brune assise deux rangées devant vous.

 Le Théorème du Perroquet de Denis Guedj est un roman qui mêle histoire des mathématiques et roman d’aventures (il y est question de foret amazonienne, de bibliothèque perdue, etc…). L’histoire est parfois un peu trop enfantine (cela rappelle certains romans de la bibliothèque verte) mais il permet de découvrir d’une façon amusante les grands héros de l’histoire des mathématiques comme Pythagore, Gauss, Euler, Fermat ou mon préféré, Evariste Gallois, qui est mort dans un duel (une histoire de femmes) à 20 ans. La nuit qui a précédé ce duel, sachant qu’il avait peu de chance de survivre (son adversaire était un tireur renommé), Evariste a couché sur le papier son testament mathématique (en fait, la théorie des groupes). Il a préféré accroître ses chances de mourir (en veillant toute la nuit au lieu de se préparer) plutôt que de priver l’humanité de précieuses découvertes qui allaient déboucher sur les mathématiques modernes.

Malheureusement, le roman de Guedj contient quelques inexactitudes mathématiques mais c’est excusable dans un livre de vulgarisation très grand public.

 Le Dernier Théorème de Fermat est un essai plus classique qui raconte une fabuleuse histoire, celle de la quête du grâal des mathématiques : la démonstration du dernier théorème de Fermat. A sa mort en 1665, on découvrit dans les papiers du célèbre mathématicien amateur français le théorème suivant : « Il n’y a pas de solution à l’équation Xn+Yn = Zn, si n>2). Mais Fermat ne laissa aucune démonstration de ce théorème (tout en prétendant en avoir trouvé une, « merveilleuse » selon ses propres termes). Pendant trois siècles, des centaines de mathématiciens ont consacré leur vie à la démonstration de ce théorème jusqu’à la découverte en 1994, par le mathématicien américain Wiles, d’une démonstration ingénieuse qui utilisait toute la puissance des mathématiques modernes.

Comme pour le roman de Guedj, le Dernier théorème de Fermat passe en revue les grands moments de l’histoire des mathématiques. On retrouve également nos héros immortels (dont le très attachant Evariste Gallois ou la mathématicienne Sophie Germain qui s’était travestie en homme pour suivre les cours de l’école Polytechnique).

Le livre de Singh est passionnant (plus captivant que beaucoup de romans). Il est impossible de le lâcher. Je l’ai lu d’une traite pendant le vol entre Doha et Casablanca, refaisant certaines démonstrations élémentaires sur le sac à vomi en papier de l’avion (mon voisin a dû me prendre pour un fou).

 

05/09/2005 dans Livres | Lien permanent | Commentaires (19) | TrackBack (0)

True Tales of Human Life

057121070801lzzzzzzzMes plus belles découvertes littéraires ont souvent été le fruit du hasard : un conseil donné par un inconnu dans une librairie, un livre trouvé dans la commode d’une chambre d’hôtel, etc…

Au cours de mon passage à Paris, le matin même de mon retour à Marrakech, j’ai fait un tour à la Fnac pour refaire ma provision de bouquins. J’ai lu des dizaines de quatrième de couvertures, fait mes choix et me préparais à quitter le magasin quand j’ai ressenti une envie irrépressible d’acheter du Paul Auster, et en anglais.

Je n’avais plus beaucoup de temps. J’ai couru au rayon littérature anglophone et pris le premier roman de Paul Auster qui s’est présenté à moi. J’ai jeté un regard furtif sur le titre : « True Tales of American life ». OK, je n’avais pas lu celui-là.

En déballant mes livres dans le metro pour mieux les examiner (j’ai toujours adoré ce petit plaisir), je me suis rendu compte qu’il ne s’agissait pas d’un roman de Paul Auster mais d’un recueil de nouvelles sélectionnées par l’écrivain. J’étais un peu déçu au début mais après avoir lu les premiers récits, j’étais heureux de cette méprise

En 2000, la radio américaine NPR s’est livrée avec Paul Auster à une expérience originale : les auditeurs de la station étaient invités à envoyer des textes relatant une de leurs aventures personnelles. Il n’y avait aucune contrainte de longueur, de contenu ou de style, il fallait seulement que ces histoires soient vraies.

Le succès du projet a été phénoménal et des milliers de textes ont été envoyés. Ce recueil est une sélection des histoires les plus marquantes regroupées par thèmes (Objets, Animaux, Amour, Rêves, Guerre, Mort, Méditations….)

Ces 179 textes ne sont pas des chefs d’œuvres de littérature mais c’est cela précisément qui fait leur force : ils racontent avec une simplicité cristalline des tranches de vie de gens ordinaires, des histoires étonnantes, émouvantes, tristes, drôles, pathétiques, etc…

C’est un fantastique panorama de la société américaine, une sorte de Comédie Humaine écrite par « génération spontanée ». Mais la dimension anthropologique est rapidement dépassée : il s’agit avant tout d’histoires humaines et de thèmes universels : amour, amitié, espoir, etc…

A une époques où les Etats-Unis et la société américaine sont tellement décriés, il est salutaire de lire ce genre de livres, pour ce souvenir que les américains sont aussi des hommes, qu’ils ne sont pas tous des bovins stupides gavés d’Ice-cream, d’autosatisfaction et d’arrogance.

Mais il serait injuste de réduire ce recueil à une simple réhabilitation de la société américaine. Il s’agit du reflet, dans un miroir naïf et sincère, de quelques visages de la nature humaine.

22/06/2005 dans Livres | Lien permanent | Commentaires (28) | TrackBack (0)

Un questionnaire de plus

WertherausschnittC’est la vogue des questionnaires sur les blogs en ce moment : après le questionnaire musical, voici le questionnaire littéraire. Je vois d’ici se profiler, gros comme un troupeau d’éléphants constipés, le questionnaire culinaire, le questionnaire touristique (vos villes préférées, etc…) ou encore le redoutable (mais forcément inévitable, ce n’est qu’une question de temps) questionnaire sexuel.

En attendant, c’est toujours un plaisir de participer à ces petits jeux. Sur l’invitation de Blaise, je vais répondre au questionnaire sur la lecture.

 Combien lisez vous de livres par an ?

Je n’ai jamais compté et je suppose que c’est très variable d’une année à l’autre. Mon adolescence a été une période de lecture frénétique. J’ai beaucoup moins lu pendant mes années de perdition en école de commerce. Depuis mon entrée dans la vie professionnelle, j’essaye  de reprendre un rythme de lecture honorable. En ce moment, je dois lire entre 5  et 8 livres par mois.

Quel est le dernier livre que vous avez acheté ?

La semaine dernière, j’ai acheté en urgence Attitudes anglo-saxones de Angus Wilson chez un bouquiniste de Casablanca. J’avais absolument besoin d’un bouquin pour meubler trois heures de train et c’était le seul livre qui me paraissait lisible dans son énorme collection d’Arlequin. J’ai finalement beaucoup aimé ce roman.

Sinon, j’ai rapporté de Paris quelques livres dont je ne suis pas encore arrivé à bout :

Les trois Rois : La monarchie marocaine, de l'indépendance à nos jours
de Ignace Dalle

Là-bas de Huysmans

The Great Gastby de Scot Fitzgearald

True Tales of American life de Paul Auster

Sapho d’Alphonse Daudet

Manifeste pour un Islam des lumières de Malek Chebel

Moins que Zero de Bret Easton Ellis

Quel est le dernier livre que vous avez lu ?

L’Or de Blaise Cendrars, que j’ai fini presque en même temps que Le Journal de l’abbé Mugnier


Listez
5 livres qui comptent beaucoup pour vous ou que vous avez particulièrement appréciés.

 C’est un vrai déchirement de faire cette liste. Presque tous les livres que j’ai lu (même les plus idiots) comptent beaucoup pour moi.

Mais il faut jouer le jeu :

La Recherche du Temps Perdu de Marcel Proust. Je sais que ça fait « gars qui se la pète » mais ce livre a été un éblouissement.

Au Bonheur des dames d’Emile Zola, c’est le premier « classique » que j’ai lu. Ce livre m’a fait découvrir qu’il n’y avait pas qu’Agatha Christie et les romans d’aventure dans la vie

Mort à Crédit, Voyage au Bout de la nuit et Nord et de Céline. (A mon avis, ces trois livres forment un ensemble).  Un  innoubliable électrochoc. 

Kapput de Curzio Malaparte.  Malaparte écrit comme Fellini fait du cinéma.  C'est vertigineux.

Des souris et des hommes de Steinbeck.  une vision desespérée et belle de la condition humaine

A qui passez vous le relais et pourquoi ?

A Label Ash, parce que j’aimerai bien savoir ce qu’il lit.

06/04/2005 dans Livres, Moi je | Lien permanent | Commentaires (3) | TrackBack (0)

Marrakech

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