Une nouvelle édition du festival d’Essaouira s’est clôturée sans que j’eusse l’occasion de profiter pleinement de cet évènement. Comme l’année dernière, j’y ai juste fait un tour de quelques heures, juste assez longtemps pour repartir avec la ferme intention de revenir un jour pour le faire vraiment ce p*** de festival (et en espérant que la paresse, ou des raisons très valables, ne me feront pas reporter une nouvelle fois cette vertueuse résolution).
En 2005, j’étais arrivé le matin et reparti tôt le soir. Cette année, je suis arrivé le soir et reparti tôt le matin. Ce n’est pas l’irrésistible appel des gnaouas qui m’a fait quitter Marrakech (et tous les valuables qu’elle accueillait ce soir-là) pour filer à l’anglaise à Mogador, mais une invitation à un pince-fesses mondain que j’ai jugé bon de ne pas décliner.
Le plus impressionnant à Essaouira est cette sérénité qui flotte sur le festival malgré la foule, le vacarme et même les sonos pétaradantes des stands des sponsors (« le concours de Djembe commence dans 5 minutes ! » hurle l’animateur surexcité du stand Méditel entre deux couplets d’une chanson de Shakira). En effet, malgré cette invasion commerciale et la foule (rançons du succès), l’esprit d’Essaouira, ce mélange de paix et de fraternité joyeuse, réussit à surnager.
Pour se rendre au Café Taros où était organisée la soirée, il fallait traverser toute la place Moulay Hassan. L’expression « bain de foule » est bien impuissante à décrire l’impression qu’on ressent en se frayant un chemin dans cette multitude compacte, colorée, chevelue et sautillante (et un brin enfumée parfois). C’est une plongée en foule profonde dont on ressort déboussolé et impressionné par la diversité des populations qui la composent. Le Festival d’Essouira est un des rares endroits où se réalisé une telle mixité sociale au Maroc, terre de contrastes (et de strates sociales bien cloisonnées).
Le contraste était saisissant entre la foule des « vrais » festivaliers qui se pressaient sur la place et celle des mondains endimanchés qui, perchés sur la terrasse du café Taros, regardaient, une coupe de champagne à la main, la foule onduler en contrebas.
Ce serai hypocrite (et ingrat) de ne pas reconnaître pas que cette soirée au café Taros était belle. La vue sur la ville était fantastique et l’esprit d’Essaouira est monté jusque là.
La soirée a d’ailleurs attiré bien du monde et le café Taros peinait à contenir tous ceux qui se pressaient à la porte et buttaient contre les deux cerbères qui en filtraient l’entrée (L’esprit d’Essouira, aussi puissant qu’il puisse être, ne pouvait pénétrer l’épaisse couche de muscle de ces deux-là).
En quittant les lieux, j’ai entendu un des organisateurs leur crier : « Plus personne ne rentre, sauf si c’est Azoulay ». A ce propos, le dit Azoulay avait fait une apparition en début de soirée et impressionnait par sa simplicité et le sentiment d’accessibilité qui émanait de lui. Un sacré monsieur…
J’ai quitté Essaouira le lendemain très tôt avec le sentiment de laisser derrière moi le Maroc que nous aimons voir.