Avant l’inauguration du festival, le Saint-graal s’appelle « accréditation ». Dans le jargon des festivals, les accréditations désignent ces petits bouts de plastique qu’on porte fièrement autour du cou, et qui donnent accès au palais du Festival.
Mais attention, toutes les accréditations ne se valent pas, et la couleur de la vôtre indique votre rang dans la hiérarchie festivalière. A Marrakech, c’est jaune pour la presse , gris pour les techniciens, bleu pour les professionnels, violet pour les officiels (la classe), blanc pour les « invités »… cette dernière espèce d’accréditation donne surtout droit à se faire discret et à parler poliment aux milliers d’agents de sécurité qui encadrent le Palais des Congrès.
Mais quelque soit la couleur du bout de plastique qui se balance à votre cou, de nombreuses portes resteront fermées devant vous sans la pierre philosophale : le carton d’invitation frappé de l’étoile du festival, vous enjoignant de porter un costume sombre et une cravate, et vous priant d’honorer de votre présence tel ou tel événement.
Ne parlons même pas des soirées VIP, VVIP ou VVVIP, aussi difficilement accessibles que la chambre à coucher de Britney Spears (oups, mauvais exemple !), et pour lesquelles les invitations sont aussi convoitées que des permis d’exploration pétrolière libyens (mes exemples sont bien curieux aujourd’hui…)
Contentons-nous de certaines manifestations auxquelles les simples mortels comme votre serviteur peuvent espérer participer : projections spéciales, hommages ou cérémonies. Pour toutes ces joyeusetés, les invitations se convoitent, les invitations se quémandent, les invitations se mendient
Certaines personnes ne reculent devant aucune bassesse pour obtenir un de ces précieux cartons. On les voit, comme des pénitents mexicains, se traîner sur les genoux devant le palais des congrès, les cheveux hirsutes et le visage couvert de cendres, accrochés aux basques d’un membre de l’organisation. Ce dernier, épuisé par le stress accumulé depuis le début du festival, apitoyé par tant de détresse, lâche parfois une invitation à l’intention du pénitent, avec dans les yeux ce mélange de compassion et de dédain que devait avoir le Calife Haroun Errachid quand il jetait des pièces d’argent à la foule de Bagdad.
Organiser le festival de Marrakech est une double gageure. Il faut relever le défi logistique de cette énorme machine. Sachant que des milliers de personnes, qui n’ont pourtant rien d’autre à faire pendant le festival que manger des petits-fours aux cocktails, attendent le moindre couac pour crier à la mauvaise organisation en se resservant du champagne aux pince-fesses que vous avez péniblement organisés. Ensuite, il faut gérer l’invasion des quémandeurs d’invitations dont les vols groupés et insistants ne sont pas sans rappeler quelques unes des scènes les plus effrayantes des « Oiseaux » d’Hitchcock.
Je ne sais pas laquelle des deux facettes de cette mission est la plus difficile.
Toujours très sympa à lire. Merci :-)
Rédigé par : Laurent Bervas | 13/12/2007 à 08:45
J'ai beaucoup aimé cette note...
Et oui, l'humain se rabaisse considérablement s'il croit (souvent à tort) qu'il obtiendra de quoi s'élever... (mmm... compliquée, ma phrase)
Rédigé par : Meriem | 13/12/2007 à 21:55
Heureuse de te lire encore! Mais les films..... c'est ça qui me gonfle: les gens qui vont aux festivals que pour les petits-fours..... Tu as vu quelque chose?
Joan
Rédigé par : Joan | 14/12/2007 à 15:09
Joan> Malheureusement, je n'ai pas pu voir grand chose. Le séminaire MFD me prend trop de temps.
J'ai vu un film hollandais qui s'appelle Wolfebergen (un drâme familial poignant) et j'ai assisté à l'avant première du film de Nabil Ayouch "Whatever Lola Wants".
Cette année la programmation est assez pointue et la sélection relevée.
Rédigé par : lebaroude | 14/12/2007 à 16:44
Bravo pour ton blog, j'adore ton style! qu'est ce que tu penses de Whatever Lola Wants?
Rédigé par : | 15/12/2007 à 00:07
Salut, cher marrakchis
moi aussi j'était de la partie (mon premier festival)
tu trouvera quelques photos ici :
http://img170.imageshack.us/img170/1051/journaldeborddunfestivaaq6.jpg
et
des vidéos ici :
http://renger.mon.allocine.fr/
by
Rédigé par : renger | 23/12/2007 à 19:13